3 mai 2008

Nouvelle libre : Avant l'envol

Nouvelle que j'ai écrite pour un devoir de français de ma (première) seconde. Il fallait écrire l'histoire d'un enfant disparu en se basant sur une histoire vraie d'un article de journal.


Avant l’envol



Au fin fond du Monde, une très vieille légende raconte que, parfois, des anges descendent des Cieux sur Terre. Leur apparition est merveilleuse, et leur disparition est mystérieuse. On dit même que de leurs derniers souffles naissent des arcs-en-ciel. On ne les voit pas, on ne les reconnaît pas. Certains illuminent des vies, meurtrissent des cœurs par leur disparition. D’autres, au contraire, jouent avec les vies et peuvent faire de la Terre un enfer.

Je suis l’un d’entre eux. Mon nom est Elen. J’ai dix de vos années, mais mon âge spirituel remonte à bien loin, lorsque les continents n’étaient pas encore ce qu’ils sont et que des étoiles, de la poussière céleste tombait sur Terre en de multiples gouttes dorées, pareilles au miroitement de la pleine lune sur l’eau. Mais, il y a deux jours, je suis mort. Laissez-moi vous conter cette histoire…


Là-haut, ça s’agitait. Une personne allait être désignée pour naître sur Terre, afin de guider les Hommes vers le Bien, ou vers le Mal. Avant de continuer, quelques explications s’imposent.
Mes frères sont, à mon image, des Âmes, ce que vous, Humains, appelez des anges. Nous vivons dans un autre niveau d’existence, là où la matière n’existe plus. De temps en temps, l’un de nous est tiré au sort pour être envoyé sur Terre. Notre mission est simple : faire avancer vos vies, votre conscience, votre esprit pour qu’un jour, peut être, nous puissions nous retrouver dans le même Monde. Mais, tout comme vous, nous ne sommes pas tous semblables. Ainsi, certaines Âmes peuvent être cupides, gourmandes, avares, paresseuses, luxurieuses, coléreuses ou envieuses, parmi les principaux pêchés. Mais aucune Âme n’est foncièrement mauvaise ou bonne. Lorsque l’un de nous doit être désigné, tout le monde veut être cet élu. Et pour cause : la vie là-haut n’est pas si idyllique que cela en à l’air. Nous avons autant d’occupations et de problèmes que vous. Nos deux Mondes co-existent et se complètent l’un, l’autre. C’est pourquoi toutes les Âmes souhaitent descendre. De plus, une fois notre vie sur Terre achevée, nous pouvons rejoindre le paradis. Là-bas, le temps n’existe plus. On oublie tout et on commence une nouvelle vie, la plus belle de toutes. Mais moi, je ne pourrais probablement pas. Moi, j’ai échoué…

J’étais un pur, c'est-à-dire un de ceux qui n’avaient jamais vécu sur Terre. En haut, il y a les purs, et les illuminés, ceux qui ont finit leur cycle de vies sur Terre et ont rejoint une nouvelle étape, passant d’Esprit à Âme. Autant dire que de descendre sur Terre était pour moi une grande épreuve, et cela m’intriguait.
On m’avait envoyé en France, en Bretagne, dans les environs de Rennes. Mes parents étaient deux personnes plutôt modestes, aimantes, et dont la vie n’avait pas toujours été facile. Tout avait été très vite. J’avais été tiré au sort et, le lendemain, je naissais. J’aurai peut être pu faire de grandes choses. Oui, mais il y avait eu une erreur. Je n’aurais pas du être envoyé dans ce Monde, pas à cette époque. Je ne pouvais pas y survivre. Chacun de nous possède, comme je l’ai dit précédemment, un pêché originel. Moi, j’avais hérité de la curiosité, ce qui n’est peut être pas en soit le pire des pêchés. Mais nous sommes également gratifiés d’une qualité. Le sort a voulu que la mienne soit la compassion. Un mélange plutôt détonnant quand on sait ce que l’on peut trouver dans le cœur des gens, en fouillant bien.
Durant toute mon enfance, tout se déroulait dans la perfection. J’étais un enfant plutôt réservé, mais aimant. Dès cette époque, déjà, j’étais destiné à devenir celui qui rapprocherait des ethnies, ou qui anéantirait des barrières liées aux religions, aux couleurs, ou à je ne sais quoi d’autre. Une mission, et pas des moindres.
Je venais d’avoir 10 ans. Nous étions le 3 juillet 2005, et nous rentrions d’un repas familial près de Nantes. Le destin me frappa, comme la foudre sur l’arbre. Un destin hors du commun, puisque cet évènement était animé par une puissance malveillante, celle-là même que je devais combattre. Mais, si tôt ? Je vis ce signal que mes parents, eux, ne semblaient pas voir. Quelque chose d’indescriptible, mais pourtant un souvenir impérissable. Je n'eus pas le temps de réagir, notre voiture fut littéralement aplatie sous un camion. Mon père et moi nous en sortîmes miraculeusement avec seulement quelques fractures. Mais ma mère y laissa la vie. Tout alla très vite ensuite. L’enterrement. Puis mon père qui sombra petit à petit dans l’alcool. Il m’était de plus en plus difficile d’ignorer tout cela et de me concentrer sur ma mission.
Ce jour-là, le 8 décembre, j’en avais assez. Bien que je savais que mon géniteur n’était en réalité qu’un pion dans cet ensemble, j’y étais attaché et je voulais plus que tout l’aider, je voulais savoir ce qui le détruisait. Alors, lorsque le soir fut venu et qu’il me croyait couché, j’allais agir. Assis sur son fauteuil, il fixait le vide, la bouteille dans sa main gauche. Je m’approchais encore et encore.
-Olivier, dit-il en me voyant, tu n’es toujours pas couché ? Tu dev…
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase. Son regard avait croisé le mien, et je m’adressais à présent à son Esprit.
-Père, quel est donc ce mal ?
-Olivier… Je… Tu… Que m’arrive t-il ?
-Peu importe. Le temps est compté maintenant. Dis-moi, quelle est cette chose qui te ronge ?
En effet, le temps défilait pour moi. Je savais pertinemment que de dévoiler mon Âme m’affaiblissait de minute en minute. Mais cela m’était égal. Je voulais qu’il soit heureux, même si pour cela je devais donner ma vie. C’est ça, la compassion, entraînée à l’excès.
-Je… Tu devrais le savoir, Olivier. Depuis… sa mort, mes jours sont amères, mes nuits sans fin et sans espoir.
-Et alors ? Tu laisses tomber ? Tu laisses ton être mourir de la main du chagrin ? Alors tout ce que maman a construit n’aura servit à rien…
-Je… Désolé, je suis faible.
-Non, tu m’entends ! Tu vas te battre. Ton bonheur est ma mission, à présent.
-Ta mission ?... Je ne comprends rien.
-Je ne peux rien te dire de plus. Tu oublieras cette conversation et… non, il est trop tard !
Je me sentais partir. Ma matière se dissipait, mon Âme s’envolait.
-Père, il est trop tard. Ne perds pas espoir, garde foi en toi et en la vie. Tu me retrouveras dans tes songes. Tu seras heureux. Je donne ma vie, mon destin pour cela. Adieu, père.

C’en était finit. Jamais je ne ressentis pareille blessure, pareil arrachement. Lorsque j’ouvrais les yeux, il était devant moi, dormant dans son fauteuil. Dehors, l’averse se dissipait un peu, mais tout en continuant d’arroser les environs. J’étais entre tout, ni Âme, ni Homme. Rien que Moi.
Le soleil se leva et déposa ses premiers rayons sur le visage de mon père. Celui-ci se réveilla en un puissant bâillement. Puis il se leva, s’approcha de la fenêtre pour admirer le spectacle. Un magnifique arc-en-ciel illuminait le ciel à présent bleu, et sur le sol humide des dernières gouttes tombées, un doux parfum de bien-être glissait de flaque en flaque. Puis mon père m’appela afin que je vienne admirer, à mon tour, ce magnifique spectacle. Aucune réponse ne lui parvint, évidement. Au deuxième appel anxieux, le doux parfum s’était déjà transformé en un vent glacial, murmure d’une peur inimaginable. Le constat était là : j’avais disparut. Sous mes propres yeux, qui plus est. Mon père était complètement déboussolé. Dommage, je m’y étais fait, à cette vie…
Plus tard on retrouverait mon corps mutilé quelque part. Mon père serait fou de chagrin, puis, comme convenu, il oublierait, avec le temps. Peut être même qu’il refera sa vie. Le faible part, le fort reste. C’est comme ça, la vie, c’est dans l’ordre des choses…

Mais moi, à présent, je dois être jugé pour savoir quel sera mon sort. Si je suis déclaré coupable de faiblesse humaine, je devrais retourner au stade d’Humain, en oubliant tout et ce jusqu’à ce que mon cycle de réincarnation se termine et que j’atteigne l'Absolution. Sinon… Sinon, je pourrais te rejoindre, mère.


La vie n’est pas juste, mais même si mes rêves se sont envolés, il reste encore de l’espoir.

Prenez garde, un ange est peut être très proche de vous. Si tel est le cas, chérissez-le de tout le bonheur qu’il mérite et qu’il vous donne. Avant qu’il ne s’envole.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Mais c'est délicieusement bien. Oui le mot délicieux convient très bien.