19 avr. 2008

Première nouvelle sur le Troisième thème

Voilà la première nouvelle sur le troisième thème. Elle s'appelle "Dis-moi". Bon les contraintes, c'était pas évident du tout, je dois dire. C'est plus ou moins respecté ! ^^ J'espere que vous reconnaîtrez la référence aux Pink Floyd.


« Dis-moi, comment as-tu vécue ta vie, et qu’as-tu vu ? Sous quelle lune es-tu née, sous qu’elle étoile as-tu grandi ? Dis-moi… Racontes-moi ces nuits blanches, ces nuits noires, ces nuits de cauchemars. Et, surtout, dis-moi, qu’est ce qui guide tes pas ? Laisse-moi t’entendre.

C’était lâché. Elle le regarda, d’un air effrayé, puis baissa les yeux et ne dit rien.
« Un tel silence, rajouta-t-il. Signifie-t-il que tu n’as rien vu ?
Elle ferma les yeux, crispa ses mains.
« S’il te plait, ne dis rien de plus, dit-elle. S’il te plait…

A son tour, il devint silence. Mais ses yeux ne pouvaient se détacher de cet être, de cette personne qui semblait dire « Embrasse-moi, mais juste avec les yeux ». Juste avec les yeux.
Les plus beaux baisers se font avec les yeux, et les siens étaient d’or. Il suffisait simplement qu’elle lève le regard vers lui, et alors il sentait les battements de son cœur s’emballer, ses mains se crisper, ses lèvres trembler. Elle était sa drogue. Il aurait pu passer des heures à l’embrasser du regard, à se perdre dans ses yeux bruns, ses yeux en amande, et s’égarer jusque dans la petite tâche foncée qu’elle avait, tout près de la pupille, et qui semblait être comme une étoile merveilleuse sur la voie lactée. Mais ce n’était pas aussi simple. Rien n’est jamais aussi simple.
Là, elle l’avait compris. Il s’était juré de ne pas se taire plus longtemps. Alors, voilà, il voulait le lui dire. Mais il n’eût même pas besoin de prononcer ses mots, elle l’avait simplement lu dans son regard et avait deviné ce qui l’animait.
« Je croyais qu’on était amis… »
Il ne dit rien.

Une larme coula sur sa joue, qu’elle essuya avec sa manche.
« Pourquoi ? » dit-elle.
« Parce que c’est toi. Tes yeux, si profonds. Ton sourire si lumineux. Ta voix, ton visage, ton odeur, ton rire, tes gestes, tes manies lorsque tu es gênée, lorsque tu es contente, lorsque tu es triste aussi, que tu es mal à l’aise, parce que ça fait parti de toi. Lorsque tu te sens bien, lorsque tu parles, lorsque tu écoutes, que tu remets machinalement tes cheveux en place, que tu lèves les yeux au ciel en espérant que l’on ne voit pas ou que l’on n’entende pas ce que tu viens de faire ou de dire. Lorsque tu passes ta langue sue le rebord de tes lèvres, aussi, et que tu regardes pensivement les gens dans la rue en te touchant le bout du nez. Ou encore lorsque tu es effrayée, mais pour rire, et que tu te protèges avec tes mains et entrebâilles tes yeux en faisant danser tes cils au rythme des ailes d’un papillon. Pour tout cela et pour bien plus. C’est pour cela que je t’aime. »

Il sentait son cœur battre la chamade. A plusieurs reprises, il cru même qu’il allait sortir de sa poitrine et allait courir, libre, à travers les rues de la ville, si triste.
Il allait rajouter autre chose, lorsqu’elle le coupa.
« Ne dis rien de plus. »
Elle baissa la tête. Une seconde larme coula.
« Qu’est ce que tu crois ? Tu arrives dans ma vie, come ça, et tu penses pouvoir tout bouleverser ? »
Elle se mit à sangloter. Il s’approcha d’elle pour la prendre dans ses bras, mais elle le repoussa.
« S’il te plait, ne m’approche pas… »
Puis elle se calma, respira un peu, et reprit.
« L’amour, c’est pas si simple. C’est tellement… Jour après jour, l'amour vire au gris. Comme la peau d'un homme mourant. Et nuit après nuit, nous prétendons que tout va bien. Tout va bien car nous nous aimons. Mais je veux simplement être libre, tu comprends. Je veux juste respirer tout l’air que mon corps voudra, tout l’air qu’il y a pour moi. Sans avoir à vivre avec moi. Ne plus me voir. Ne plus me voir lorsque je regarde un miroir. Parce que c’est cette image qui crée tant de malheurs. Tous les jours, ce sont les images qui rendent les gens malheureux… »
« Si ce n’était pas elles, ce serait autre chose. Je n’aime pas que ton image, tu sais. Loin de là. »
Elle baissa les yeux, une fois de plus. Elle qui était si rayonnant, si pleine de vie, la voilà noyée sous les larmes.
« S’il te plait… Ne dis plus ça. Ne dis plus rien. Désolée, mais je… Je ne veux plus t’entendre…
Elle le regarda d’un air navré, puis se retourna et prit la direction de son arrêt de bus.
« Attends ! » cria-t-il.
Elle s’arrêta, crispa la mâchoire, ferma les yeux, sans pour autant se retourner.
« Dis-moi, s’il te plait. Dis-moi ce qui guide tes pas… »
De grosses larmes roulèrent sur ses joues, qu’il laissa mourir sur son menton. Elle ne se retourna toujours pas et partit, elle aussi noyée sous les larmes.
Il resta ainsi et la regarda, impuissant, s’éloigner, toujours magnifique sous le soleil chancelant. Puis il s’adossa contre le mur, se laissa glisser au sol et se prit la tête entre les mains.
« S’il te plait… Dis. »

2 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai beaucoup aimé, trois fois, c'est un style adolescent naïf, mais tout aussi dramatique, avec qui je suis totalement en phase. Je suis vraiment content d'avoir lu des lignes pareilles.

Marine a dit…

Très triste... mais magnifique.