9 avr. 2008

Sixième Nouvelle sur le deuxième thème

Nouvel écrit sur le thème "perdu". Stan, piètre joueur de poker, est près à tout pour récupérer son argent perdu. Bonne lecture.


La Chair En Vaut La Chandelle


23h58. Le Gasmoa’s Bar. Là où la ville vomit ses déchets avant de s’endormir. À la table de la seconde pièce en sous-sol, la partie de poker touchait à sa fin. L'air y était étouffant, mélange de fumée charbonneuse, de sueur et de cendres d'une souris volante.
Tony claqua de la langue et regarda au fond de l'âme de son adversaire. Leyla et Nico s'étant couchés, il était maintenant le seul contre Stan. Et y’avait pas mal de pognon en jeu. Tony était confiant, sa main n'était pas exceptionnelle mais Stan était l'un des pires joueurs du sud de la ville. Ce dernier stressait trop et respirait mal. Il desserra son noeud papillon et l'insecte s'envola. Il respira mieux et devenait plus confiant. Il voyait sa main d'un meilleur oeil, pouvant totalement être gagnante. Tony, mécontent de ce changement d'atmosphère, lui mit la pression :
-Grouille-toi bordel. C'est pas un choix compliqué. Tu suis ou tu t’écrases.
Stan mis en branle ses derniers neurones. Il devait suivre de 40 euros et c'est exactement la somme qu'il lui restait. Ainsi, s'il perdait une fois de plus, il serait ruiné. Mais putain, un brelan de valets mentait rarement, n’est-ce pas ?
-Je suis.
Stan débarrassa tout le fric de son carré de tapis pour le jeter dans la gueule de la mise, qui avala les billets goulûment.
-Pour voir.
-Ok.
Tony abattit (à l’aide d’un petit revolver de manche) ses cartes : brelan de rois.
-Tu fais mieux, Stanley ?
-Bordel, Dieu que non.
Ce dernier montra ses trois valets, lesquels affichaient maintenant une mine timide.
-Je t'ai encore plumé, ah ah. T'es vraiment minable.
-La chance finira bien par tourner.
-En attendant, je ramasse ton argent.
Tony attrapa la gueule de la mise et lui fit vomir les billets. Puis il les ajouta à son propre paquet, qui prenait beaucoup de poids à chaque tour. Il ne comptait pas pour autant suivre un régime. Celui de Stan, par contre, n'était plus qu'un cadavre de petit somalien.
-Alors, Monsieur Ruiné ? Tu dégages avec la queue entre les jambes ou tu restes à la table comme spectateur ?
-Je veux continuer. Je peux emprunter.
-On n’est pas dans un jeu vidéo. Pas d'emprunt. On se bat avec nos propres tripes.
Stan se caressa sèchement la barbe. Des poils restèrent entre les doigts ; et le pouce, ayant froid, s'en fit une petite couverture.
-Je continue, avec mes propres tripes.
Il prit son chapeau et le posa sur le tapis.
-Ce machin fera la mise de départ.
Leyla rigola, mais Tony acquiesça.
-Comme tu veux.
Nico prit les cartes et les mélangea. Il voulut faire la nouvelle donne, mais Tony l'arrêta.
-Tu dois couper le paquet d'abord. La règle est ce qu’elle est.
-Ah ouais, c'’est vrai. J'avais oublié.
Nico sortir de sa poche-revolver une machette africaine et se prépara à trancher le corps du pauvre paquet.
-Pas avec ça, idiot !
-‘Scuse.
Nico sépara des doigts le paquet en deux et mis la partie basse au-dessus. Il fit la nouvelle donne et Stan regarda ses cartes avec dépit. La chance s'était encore montrée pudique, cette sale vierge.
C’était à Leyla de parler. Elle balança 50 euros sur la moquette verte. Tony suivit et Nico renchérit de trente.
Stan n’avait plus de quoi suivre mais il ne se découragea pas pour autant. Il enleva son costume et le posa sur le tapis. Les autres ne furent pas satisfaits.
-C'est pas assez, ce ne sont que des frusques trouvées au puces.
Il se débarrassa alors de ses chaussures, de son pantalon et de sa cravate.
-Là ça fait le compte. Mais je renchéris de mon caleçon, mes chaussettes, ma montre et ma gourmette.
Si bien que Stan se retrouva dans le simple appareil. Leyla regarda de quoi son entrejambe était fait et elle émit des yeux évocateurs.
-Cette chair-là vaudra beaucoup.
-Ne fantasme pas. Contente toi de jouer.
Leyla suivit, idem pour Tony et Nico. Pour voir. Et Leyla les écrasa tous avec une suite de pique. La chance féminine, dangereuse.
Stan avait les larmes aux yeux. Oui, la chance tourne, mais pas pour ta gueule. Sûr qu'il avait sacrement mal joué depuis le début. Même une grand-mère aurait mieux géré son fric. Il ferait mieux de partir maintenant, avant qu'il ne soit trop tard. Limiter les dégâts, accepter la défaite avec humilité.
Ou alors, non. Pas question de fuir comme un mioche, il se battra jusqu'au bout et regagnera tout ce qu'il avait perdu. Ouais, ils vont morfler ces connards. A commencer par cette salope de Leyla, puis ce sale vicieux de Nico, et pour terminer, ce faux caïd de Tony. Il les renverra dans l'utérus maternel, dépouillés de leur compte en banque.
-Arrête de penser à des choses malsaines Stan, cherche plutôt de quoi continuer la partie. T'es à poil et sans personne pour t'aider... T'es clairement fini, accepte-le.
-Non... Je... J'ai des ressources insoupçonnées.
-Je suis curieux de voir où ça.
-Tu le sauras au paragraphe suivant.
Stan s'enfonça les deux premiers doigts de la main gauche au fond de la bouche et les mordit jusqu'à l'os. Puis il tira son poignet d'un coup violent et les deux doigts se séparèrent de la main. Stan les cracha sur le tapis. Le sang cramoisi se mélangea au vert de la moquette avec une classe exquise.
Leyla suivit, et Tony renchérit. Nico renchérit plus encore. La mise montait bien haut. 500, 600... Stan voulut encore continuer. Il se leva et monta sur sa chaise. D'un saut sec et puissant, il plongea vers le sol, son bras droit en avant. L'épaule se brisa et le bras pendit lamentablement le long du corps. Stan put alors l'arracher facilement de sa main valide. Il le déposa sur le tapis et esquissa un sourire crispé de souffrance.
-Sacré courage Stanley, mais ça ne fait pas le compte.
-Mais j'ai pas encore fini.
Il s'aiguisa les ongles avec son as de pique. Quand ils furent parfaitement tranchants, il se planta trois doigts dans le globe oculaire gauche et en arracha l'oeil.
-Avec ça en plus, j'atteins la mise, hein ?
-Ouais, on va dire que ça va.
-Mais je ne vais pas vous laisser me braire comme ça à chaque fois. Je vais renchérir plus encore.
-T'as bien réfléchi aux conséquences ? J'espère que t'as vraiment une bonne main, sinon ton bluff te fera plus mal à toi qu'à nous.
-Ta gueule. Je sais ce que je fais.
Stan s'agrippa la peau du pénis et la tira d'une longueur suffisante pour se l'enrouler autour du pied. Puis il démonta sa mâchoire et en détacha les incisives. Il les coinça entre la paume et les doigts pour en faire une lame et il trancha son engin d'un coup sec. Il tomba de son siège dans un cri de douleur. Leyla ramassa le sexe sur le sol et le posa sur le tapis. Nico considéra la valeur de ce pot et rendit ses cartes.
-C'est trop pour moi, je me couche.
-Moi de même, déclara Leyla. Ce bout-là ne m'excite pas quand c'est mort.
-Ah ah, alors c’est la fin de la route, annonça Tony. Stan est à la croisée des chemins.
La figure de ce dernier était maintenant violacée, tous ses nerfs étaient à vifs, son sang coulait abondamment sur le sol.
-Tu veux un verre d'eau ?
-Non merci Tony, finissons rapidement.
-Oh non, ne brusquons pas les choses. On en est à 1000 euros de mise environ, ce qui fait... Un sacré montant quand même. Alors qu'est ce qu'on décide ?
Stan regarda ses cartes. Son carré lui souriait pour l’encourager.
-T'inquiète pas, on va plumer ce connard !
-Je sais pas, vous êtes plutôt des hypocrites, vous les carrés.
-Je te dis que cette-fois çi c'est la fin. Ta bonne fin. La Victoire.
Stan essaya de réfléchir. Il ressentait les picotements de son épaule, de son oeil et de son entrejambe. Tout cela l'empêchait quelque peu de se concentrer. 1000 euros. Ticket pour un rêve américain. Une foutue chance pas gentille, et Tony qui ne perdait jamais. Mais c'était là son ultime moyen de tout récupérer. Maintenant ou jamais. Tout perdre ou tout gagner.
-Je veux qu'on se fasse un quitte ou double, Tony.
-Qu'est ce que t'entends par là ?
-Rien de compliqué. Juste TOUT ton fric, contre ce que j'ai de plus précieux.
Tony s'alluma un autre cigare, en tabac véritable de tigre Australien. La fumée lui donna confiance en soi.
-C'est d'accord. Quitte ou double de chez quitte ou double.
Il écarta les bras et avança les centaines de billets au milieu du tapis.
-A toi mon chou, mise toute ton âme.
Stan emprunta alors la machette de Nico. Il se la posa sur la nuque et respira fortement. Puis, grâce à un courage inhumain, il se trancha le cou de trois frappes successives. La tête se détacha du corps et roula jusqu'au milieu du tapis. Tony hocha le menton.
-Très bien, t'as payé pour voir.
Sûr de sa victoire, il étala ses cinq cartes. Carré de dix.
-Je suis encore gagnant, j'en suis sûr. Ah ah ah.
-Et bien non. La chance a enfin tourné ! Voici mon carré de dames, connard.
Tony s'évanouit. Il s'était fait volé par un gosse minable. Un sort pire que la mort. Lui, le dragon du Gasmoa, avait tout perdu face à un simple carré de dames.

Stan essaya de réjouir, mais il souffrait trop. Son corps décapité mourut six secondes plus tard.

Fin.

(Nairod)

2 commentaires:

Marine a dit…

Oh mon dieu, c'est horrible ^^'
Mais ce qui ne change en rien la qualité de l'histoire. Bravo.

Anonyme a dit…

Poker is rigged.
Nice one btw.